21Oct2008

Incompatibilité d’un texte de droit fiscal interne (CGI art. 164 C) avec le droit communautaire

Le principe communautaire de libre circulation des capitaux fait échec aux dispositions de l’article 164 C du Code Général des Impôts.

La Cour administrative d’appel de Marseille a  annulé le 30 septembre 2008 un jugement en date du 25 octobre 2005 rendu par le Tribunal administratif de Nice et a ordonné la décharge d’impositions sur le revenu établis sur le fondement des dispositions de l’article 164 C du Code Général des Impôts à l’encontre d’un couple de contribuables de nationalité allemande, résidant à Monaco, qui disposaient d’une habitation en France. (CAA Marseille 30 septembre 2008 n°06MA00613).

Rappelons que l’article 164 C du CGI dispose, en substance, que  les personnes qui n’ont pas leur domicile fiscal en France mais qui y disposent d’une habitation sont assujetties à l’impôt sur le revenu sur une base égale à trois fois la valeur locative réelle de cette habitation à moins que les revenus de source française des intéressés ne soient supérieurs à cette base auquel cas le montant de ces revenus sert de base à l’impôt.

La Cour a considéré d’abord que les dispositions de l’article 56 CE relatives à la liberté de circulation des capitaux à l’intérieur de l’UE sont invocables depuis le 1er janvier 1994 (art. 73 B du Traité de Maastricht) par un ressortissant communautaire résidant dans un pays tiers et notamment à Monaco.

Elle a considéré ensuite que ce ressortissant peut invoquer les dispositions de l’article 12 CE interdisant toute discrimination exercée en raison de la nationalité dans le domaine d’application du traité.

Elle en a déduit que ces dispositions combinées s’opposent à ce que deux ressortissants communautaires placés dans la même situation soient, en raison de leur différence de nationalité, imposés différemment.

La Cour a relevé que les requérants, résidents monégasques, étaient dans la même situation qu’un ressortissant français résidant à Monaco et disposant d’une habitation en France.

Elle a jugé que l’application combinée de l’article 164 C du CGI et du paragraphe 1 de l’article 7 de la convention franco-monégasque a conduit l’administration fiscale à soumettre les requérants à l’imposition d’un revenu forfaitaire égal à trois fois la valeur locative réelle de la maison dont ils sont propriétaire en France alors qu’un résident français résident à Monaco est soumis à l’impôt sur le revenu dans les mêmes conditions que s’il avait eu son domicile fiscal en France.

La Cour en conclut que cette différence d’imposition qui ne résulte que d’une différence de nationalité constitue une restriction aux mouvements de capitaux entre Etats membres et pays tiers et méconnait ainsi les dispositions des articles 12 et 56 CE. Elle a également considéré que les modalités de taxation de l’article 164 C du CGI constituent une discrimnation arbitraire au sens du 3 de l’article 58 du Traité CE.

La Cour a suivi les conclusions de son commissaire du gouvernement, Monsieur Emmanuelli.

Le 21 octobre 2008,

Philippe NATAF
Avocat à la Cour spécialiste en Droit Fiscal

N.B.: Le Conseil d’Etat a été saisi d’un pourvoi en cassation déposé par le ministre du budget à l’encontre de l’arrêt commenté.

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